Jeannol, blond comme l’or

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Articles · 06/09/2012 à 08:55
06/09/2012 • 08:55

Avec une cinquantaine de buts, Philippe Jeannol restera comme le défenseur le plus offensif de l’histoire de l’ASNL. Gaucher habile, il a montré sa haute silhouette blonde sous les maillots nancéien et parisien, atteignant même le Panthéon de la sélection nationale, après une épopée olympique couronnée d’or en 1984.

Né à Nancy durant l’été où les Tricolores d’Albert Batteux s’assuraient une formidable troisième place lors de la Coupe du Monde en Suède, Philippe Jeannol ne savait pas, en ouvrant les yeux sur 1958, qu’il se servirait avec aisance de son pied gauche, à l’image du toutefois inimitable Roger Piantoni. Il n’avait guère l’allure svelte, le bonhomme était plutôt longiligne, mais il avait plus de cœur au ventre que de vague à l’âme. Philippe Jeannol était fier et généreux. Peu disposé à s’immiscer dans les conquêtes offensives, il proposa son bagage technique aux divers rôles du milieu de terrain et de la défense. L’œil avisé qui était le sien lui permettait de voir l’action de loin et de la conduire bien souvent à son terme.
« J’ai réussi une cinquantaine de buts sans jamais avoir joué en attaque et sans avoir tiré le moindre penalty, fait-il savoir. Si tel avait été le cas, j’aurais peut-être doublé les points ! »

Son premier but, inscrit chez les pros nancéiens à l’âge de 17 ans et demi seulement, fut aussi le dernier qu’encaissa l’impayable Marcel Aubour, gardien du Stade de Reims et de l’équipe de France, après avoir joué à Lyon et Rennes. À plus de 35 ans, Aubour tira en effet sa révérence au soir de ce match Nancy-Reims. Aujourd’hui consultant Canal Plus, Philippe Jeannol revient sept ou huit fois par saison à Picot, ce stade qu’il n’a pas connu comme joueur dans sa ligne d’architecture actuelle, mais qui demeure le nid de ses rêves de gosse devenus réalité. « Picot, c’est ma vie et c’est ma jeunesse », savoure t-il. De même qu’il lui fait chaud au cœur que l’ASNL soit, en dépit de ses difficultés, accrochée aux basques de la Ligue 1. « A une époque, différente de celle que j’ai connue, où le football est devenu celui des banquiers, avance Philippe Jeannol, rester parmi l’élite de manière durable constitue une belle performance. »

Quelle qu’ait été sa trajectoire, avec ses épopées, Nancy a toujours été un petit club, au regard des budgets de pas mal d’autres. Philippe a été de ceux qui ont construit son palmarès, et il figurait dans l’équipe lauréate de la Coupe de France en 1978. Inoubliable soirée du Parc des Princes baignée de magie par la classe d’un joueur d’exception. « Oui, confirme Philippe, nous étions un petit club transcendé par un grand footballeur. » Hommage à Michel Platini que vénèrent comme une icône tous ceux qui l’ont approché. De la tête, du pied (gauche), Philippe Jeannol apportait une plus-value aux schémas tactiques de Nancy et si le joueur a participé à quelques exploits nancéiens en qualité de milieu de terrain ou libero, notamment en ce soir inoubliable au Stade du Ray (victoire 7-3), c’est bien Georges Huart qui lui a donné un élan décisif en plaçant Jeannol au poste de latéral gauche. « En fait, constate Philippe, j’étais polyvalent. J’ai même joué dans les buts contre Brest. »

 

International contre l’URSS

En 1984, changement de braquet. Philippe Jeannol réalise deux coups majestueux. L’ancien poussin de l’ASNL devient champion olympique avec Henri Michel et endosse le maillot du Paris Saint-Germain. « J’avais été approché par le Matra, rappelle-t-il, mais c’est le PSG de Francis Borelli qui m’attirait. » Il y côtoiera Bats, Rocheteau, Susic, Fernandez, Halilhodzic, Bathenay et, plus tard, Jean-Michel Moutier. Plein essor de carrière, et voici une sélection tricolore tombée du ciel. Une seule, contre l’URSS en 1986, mais quel honneur et quel bonheur. « J’y ai joué au côté de Platini, Bats, Tigana, Boli, Papin. Malheureusement, les places étaient comptées et j’évoluais au même poste que Bossis et Battiston. C’est dire si la concurrence était serrée ! », plaide Jeannol. Sa naissance, sa famille, sa vie, son club d’origine, tout fait dire à l’enfant du pays que Nancy cèle les émotions et les faveurs de Philippe Jeannol.
Philippe Jeannol commente les matchs pour Canal +
Pourtant, sept saisons parisiennes, la grandeur du Parc, la passion du public de la capitale lui garantissent la pérennité d’un vrai coup de cœur pour Paris. « Je ne vais faire de mal à personne, espère cependant le grand Jeannol, en disant que je suis de Nancy et que j’aime l’ASNL. » Voilà un défenseur qui défend bien son club. Belle santé pour toi, cher Philippe. Ceux qui t’ont vu jadis, remonter le long de la ligne blanche et terminer tes courses d’un centre ou d’un tir du… gauche, ne sont pas près de t’oublier.

Christian PORTELANCE Journaliste, auteur de AS Nancy-Lorraine, des épopées et des hommes (éditions Alan Sutton, collection Mémoire du Football).


1984, Los Angeles rime avec liesse

Un défenseur qui marqueUne médaille d’or olympique dans la boîte à gants ! Moi, je l’ai vue. Et c’était celle de Philippe Jeannol au retour triomphal de l’équipe de France des JO 1984 de Los Angeles. « Une épopée formidable, raconte le Nancéien. On a fait vingt-sept matches, éliminatoires compris, sans défaite pour achever ce parcours par une victoire en finale contre le Brésil. » Fierté légitime de Philippe dont le trophée est aujourd’hui encadré comme une relique, dans sa maison familiale. « Cependant, l’or est un peu piqué par le temps. »

L’équipe de France olympique, avec Rust, Thouvenel ou Rohr a atteint les sommets et si la performance du football tricolore ne rejoint peut-être pas, en retentissement médiatique et populaire, la réussite d’une Marie-Jo Pérec, d’un Jean-Claude Killy ou d’une Laure Manaudou, elle n’en laisse pas moins une trace indélébile dans l’histoire de la discipline… dont toutes les pages de vie ne sont pas, de nos jours, couronnés du même prestige.

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