André Luiz: "J’ai pris un coup de vieux "

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Interviews · 18/01/2012 à 09:53
18/01/2012 • 09:53

À 31 ans, André Luiz est désormais le patron du vestiaire. Fort de son expérience et d’un professionnalisme sans faille, il guide les plus jeunes et leur transmet son calme et sa sérénité.

Après Damien Gregorini, tu es le plus âgé dans le vestiaire…

Même si je savais que cela allait arriver un jour, c’est tout de même venu vite. Je me souviens encore très bien de mon arrivée à Nancy. J’avais 25 ans et j’écoutais les anciens. C’était Lécluse ou Biancalani. Sept ans plus tard, je me retrouve à leur place. J’ai forcément pris un coup de vieux. J’en parlais avec Jonathan (Brison) en début de saison, car il y a maintenant plein de jeunes dans le vestiaire et c’est à mon tour de leur donner des conseils. C’est un rôle qui me plait, car ils m’écoutent comme moi je pouvais écouter les autres au début de ma carrière. Et je les écoute aussi. Je les incite même à me parler, car eux aussi peuvent m’aider à grandir. J’ai 31 ans mais encore des choses à améliorer.

 

Vous n’êtes que deux trentenaires dans l’effectif. Est-ce aussi une explication des difficultés rencontrées cette saison ?

Plus que l’âge, c’est surtout l’expérience qui compte. Or, peu de joueurs totalisent une centaine de matchs de Ligue 1. L’arrivée de Daniel Niculae a donc été très précieuse dans ce domaine. C’est en plus un joueur calme, qui sait parler aux arbitres, calmer ses coéquipiers. C’est important pour encadrer un groupe aussi jeune que le nôtre. Nous manquons aujourd’hui d’expérience mais je suis persuadé que nous pouvons grandir très vite.

Est-ce que l’expérience joue pour une part importante dans le résultat d’une équipe ?

Je le pense, notamment dans la gestion du match. À certains moments, il faut savoir temporiser et garder le ballon alors que d’autres situations exigent de jouer vite vers l’avant. Cela s’apprend au fil des matchs. Cela veut dire qu’il est difficile pour un gamin de débuter en Ligue 1. Même s’il peut faire de bonnes choses, il en a beaucoup d’autres à apprendre. C’est seulement l’enchainement des rencontres mais aussi les erreurs qu’il pourra commettre qui le feront progresser.

 

C’est aussi ton rôle de leur transmettre ton vécu…

J’essaye par exemple de leur apprendre à parler avec l’arbitre ou avec les adversaires, à rester calmes. Quand l’arbitre siffle contre nous, cela ne sert à rien de sans cesse contester. D’une part, il va nous prendre en grippe et d’autre part cela nous fait perdre de la concentration. C’est quelque chose que j’ai appris au cours de ma carrière, car j’étais encore récemment souvent énervé sur le terrain. Ce n’est pas simple et il faut du temps pour apprendre à se contrôler. C’est un détail mais cela peut être important dans le déroulement d’un match.

 

Ton expérience est aussi importante en dehors du terrain ?

Quand on se retrouve dans l’obligation de gagner, comme c’est arrivé plusieurs fois avant des matchs à Picot cette saison, il est important de ne pas se mettre trop de pression. Avec Jonathan (Brison) ou Daniel (Niculae), on en parlait beaucoup avec les plus jeunes lors des entraînements. J’ai débuté à l’Atletico Mineiro lors d’un derby devant 80 000 supporters et face à plusieurs internationaux comme Alex, Luisao ou Maicon. J’avais 23 ans et n’avais joué que dans des championnats de troisième division. J’avais évidemment peur mais je suis resté calme et cela s’est transformé en pression positive. Il faut être tranquille mais tout de même sentir son ventre se nouer quand on entre sur le terrain. C’est ce qui permet d’être bien concentré.

 

Est-ce que l’on prend davantage de plaisir quand on atteint une certaine maturité ?

Quand tu es jeune, tu es excité par ton match mais tu ne saisis pas tout. Aujourd’hui, j’ai l’impression de vraiment ressentir le match. C’est difficile à expliquer mais j’y prends en effet davantage de plaisir.

 

Avec plus de 210 matchs de Ligue 1 avec le maillot de l’ASNL, tu as dépassé Carlos Curbelo ou Olivier Rouyer dans le classement des plus fidèles du club. C’est quelque chose qui compte pour toi ?

Bien sûr. En plus, ce sont des joueurs très respectés au sein du club et je n’oublie pas que c’est Carlos Curbelo qui m’a fait venir à Nancy. Figurer parmi les sept joueurs les plus fidèles me fait vraiment plaisir. C’est même une fierté. Maintenant, il me reste encore deux ans de contrat et j’espère continuer à réaliser des saisons pleines. Battre le record de Paco Rubio ? J’aimerai bien mais je ne veux pas trop y penser. Il faut déjà s’employer à bien finir cette saison. C’est le plus important aujourd’hui.

 

Tu disais être fier de cette fidélité à l’ASNL. Est-ce que cela a compté l’été dernier au moment de signer un nouveau contrat ?

Forcément. J’ai reçu des offres intéressantes de clubs du Qatar et de Montpellier mais je venais aussi de vivre six belles années à Nancy. Je m’entends très bien avec tout le monde au club, aussi bien les gens du centre d’entraînement que ceux quoi travaillent au stade. Mes enfants sont aussi désormais bien intégrés à leur nouvelle vie. Je me souviendrais toujours de la première journée de ma fille à l’école. C’était très dur pour elle et un vrai crève-cœur pour moi. Pour toutes ces raisons, j’ai décidé de prolonger. Et aussi parce que nous avons déjà discuté d’un projet pour mon après-carrière. J’ai envie de rester à l’ASNL.

 

Cette expérience et cette longévité à l’ASNL te donnent aussi de nouvelles responsabilités comme de porter le brassard de capitaine. Cela veut dire quoi pour toi être capitaine ?

C’est d’abord une grande joie et une belle preuve de confiance de la part du coach, du président et des joueurs. Ensuite, Youssouf (Hadji) m’avait prévenu que j’allais recevoir pas mal de coups de fil. Mon rôle est de représenter les joueurs et donc d’intervenir auprès du coach pour régler les problèmes. Hormis un ou deux détails insignifiants, ce n’est pas encore arrivé cette saison. Le président, le vice-président et les journalistes me téléphonent aussi plus souvent. Être capitaine, ce n’est pas seulement porter le brassard pendant les quatre-vingt-dix minutes d’un match, c’est aussi motiver les joueurs tout au long de la semaine, leur faire sentir l’importance du résultat.

C’est aussi une motivation supplémentaire ?

Oui, car cela donne encore plus de responsabilités. Un capitaine doit toujours être exemplaire sur le terrain et ne pas faire de bêtises en dehors. J’en ai fait par le passé mais c’est fini (rires). Cela m’a également redonné de l’énergie mais ne m’a pas changé pour autant. Je suis resté le même joueur et ne vais pas me mettre à taper sur la table à la moindre occasion. Je reste calme, tranquille et essaye de donner des conseils. De toute façon, ce ne sont pas ceux qui parlent le plus qui sont les plus écoutés.

 

Paolo Maldini a joué au haut niveau jusqu’à l’âge de 41 ans. Il te reste encore de belles années…

En plus, c’est un défenseur comme moi. Il y aussi Romario jusqu’à 40 ans. Est-ce que je vais encore jouer dix ans ? Je ne sais pas, mais je pense finir ma carrière à l’ASNL. Paul Fischer me disait souvent que je pourrais jouer jusqu’à 40 ans, car je reste toujours en place et ne cours pas beaucoup (rires). Je vais continuer aussi longtemps que possible mais ne veux surtout pas finir sur une fausse note. Si je me sens moins bien, je demanderai à rompre mon contrat.

 

Quand on raccroche les crampons, on s’éloigne aussi de la lumière des projecteurs. Cela peut faire peur ?

Grâce à Dieu, ma femme me donne de bons conseils et m’en parle souvent. Je sais que l’on est vite oublié dans le milieu du foot. Mais, j’ai toujours été quelqu’un de simple et je n’ai jamais cherché la lumière. De toute façon, nous n’en sommes encore pas là (sourire)…

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