Les années Marseillaises de Jean Fernandez

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Interviews · 24/12/2011 à 10:41
24/12/2011 • 10:41

L’entraîneur nancéien revient sur ses trois passages à l’OM.

Comment êtes-vous arrivé à l’OM en 1975 ?

L’entraîneur de mon club à Béziers, où j’ai débuté ma carrière de footballeur, s’appelait Joseph Bonnel. Il avait fait les beaux jours de l’OM et pensait que je pouvais réussir dans la cité phocéenne. Il m’a donc aidé à intégrer le centre de formation qui venait d’ouvrir là-bas. Ce n’était pas le même OM qu’aujourd’hui, mais déjà l’un des grands clubs français avec plusieurs titres de champions et quelques matchs de coupe d’Europe qui avaient marqué les Français. Je pense par exemple à un Marseille-Ajax avec Johan Cruyff. Ce n’était pas encore l’équivalent de Saint-Étienne au niveau de la passion alors que c’est aujourd’hui le premier club français grâce à ses supporters.

 

Durant ces cinq années, vous avez gagné une coupe de France en 1976 et terminé à la quatrième place du championnat en 1978…

Cette saison-là, on était premiers à la fin des matchs aller, mais, à cause d’un effectif trop réduit, on n’a pas réussi à aller au bout. On a aussi joué la coupe d’Europe, mais c’était tout de même une période difficile pour l’OM. Les présidents et les entraîneurs changeaient régulièrement. Le club manquait de stabilité et n’avait pas les moyens d’aujourd’hui. Mais, il y avait cette passion incroyable et les gens ne parlaient que de foot ! Cela m’a marqué à vie.

 

Si l’OM n’avait pas été relégué en 1980, vous auriez pu y terminer votre carrière ?

Lors de ma dernière saison, je me suis blessé au genou et j’ai dû subir une opération délicate. J’étais en fin de contrat et suis resté sept mois en convalescence. Le club m’a proposé de prolonger mais, comme cela ne se passait pas très bien sur le terrain, j’ai refusé. C’est ce qui m’a permis de partir aux Girondins de Bordeaux. À l’époque, j’imaginai déjà devenir éducateur, mais jamais de pouvoir revenir un jour pour m’assoir sur le banc de l’OM.

 

Vous revenez pourtant onze ans plus tard et devenez l’adjoint de Goethals, Ivic et Beckenbauer. Cette période vous a permis de vous construire en tant qu’entraîneur ?

Oui. J’avais déjà entraîné quatre ans en première division quand mon club de Cannes a rencontré des problèmes financiers liés à la fuite en Uruguay de Jacques Médecin, le maire de Nice et l’un des principaux sponsors du club. J’ai alors saisi l’opportunité qui s’est offerte à moi de retourner à Marseille. Travailler avec Goethals, Ivic et Beckenbauer dans un club qui avait l’ambition de gagner la Ligue des Champions était extraordinaire. Ces trois entraîneurs très expérimentés m’ont beaucoup appris dans la gestion des entraînements et des hommes. Cela a été une période très riche sur le plan humain car c’était des professionnels passionnés.

 

Bernard Tapie vous a donné les clés de l’équipe au début de la saison 1992. Cela a été une surprise ?

Oui, une grande surprise ! Je pensais partir et hésitais entre les propositions de St-Etienne et Bordeaux. Au mois d’avril, Tapie me dit que je vais prendre l’équipe. Je lui réponds que j’ai n’ai que 36 ans, mais il se montre ferme. Finalement, il me change au bout de six mois et remet Goethals, qui gagne la Ligue des Champions avec l’équipe que j’ai construite. L’été précédent, j’avais préféré Völler à Klinsmann, demandé à garder Boksic et insisté pour prendre Dessailly.

Votre éviction du banc de touche a été douloureuse ?

Quand je prends l’équipe, je demande à ce que Goethals reste au club pour m’épauler. Tapie ne voulait pas mais j’insiste. Il avait raison car c’est l’entraîneur belge qui m’a savonné la planche. Quand on démarre le championnat, je récupère plusieurs internationaux français qui viennent de rater leur Euro avec Platini. Ils sont carbonisés physiquement et psychologiquement. Je dois relancer la machine. Et au moment où cela repart, juste après avoir remplacé Olmeta par Barthez, Tapie me retire l’équipe. Quelques jours plus tôt, le tirage de la Ligue des Champions nous av&ait été favorable et j’imaginais déjà la finale face au Milan AC. Goethals, qui n’avait jamais gagné cette compétition, aussi et il me casse la branche comme il l’avait fait avant pour Ivic. Tapie voulait que je retrouve mon poste d’adjoint, mais j’étais déçu et n’avais plus de force. Je suis resté dans le staff pour aller voir nos futurs adversaires.

 

Douze ans plus tard, en 2005/2006, vous retrouvez à nouveau le banc de l’OM et débutez la reconstruction d’une équipe qui sera finalement championne en 2010…

Il me restait un an de contrat à Metz et j’avais de très bonnes relations avec Carlo Molinari. On n’avait pas une très grande équipe, mais les choses se passaient bien et on parvenait à assurer le maintien en fin de saison. Quand Marseille est venu me chercher, je n’ai pas hésité. Il m’était impossible de refuser une proposition de l’OM. Lors de mon premier rendez-vous, alors que le club n’avait plus gagné depuis neuf matchs avec Troussier, Robert Louis-Dreyfus m’explique qu’il n’y a pas d’argent pour recruter. On part donc de très loin. On se qualifie pour la coupe d’Europe via l’Intertoto mais on démarre mal le championnat. On est dernier fin août et on rate finalement la Ligue des Champions lors de la dernière journée à Bordeaux. On avait récupéré Pagis, Niang et Ribery. Il y avait Nasri, Lamouchi, Barthez et cela jouait bien au ballon. Seule la défense n’était pas au niveau. J’avais très envie de poursuivre l’aventure, mais des problèmes extra sportifs m’ont finalement incité à partir. C’était une grande frustration !

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