Miranda: Un coach pour la tête et les gants

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Interviews · 28/05/2012 à 10:21
28/05/2012 • 10:21

Entraîneur des gardiens professionnels depuis deux saisons, Christophe Miranda ne se contente pas de les faire travailler sur les pelouses. Il les accompagne également en dehors des séances pour les aider à bien se préparer mentalement.

Devenir entraîneur des gardiens, c’était une vocation ou c’est arrivé un peu par hasard ?

C’est un peu les deux. J’ai toujours eu une réflexion par rapport au poste et une grave blessure à la tête a précipité les choses. Cela m’a fait relativiser et m’a donné envie de passer de l’autre côté de la barrière. J’avais 25 ans et suis allé rencontrer des entraîneurs de gardiens comme Patrick Barth à Metz ou Franck Raviot à Clairefontaine. Vu que ce poste n’existait pas au centre de formation de l’ASNL, j’ai proposé ma candidature, sachant que j’étais déjà maitre d’internat et entraîneur d’une équipe de benjamins. Je ne demandais pas un emploi à temps plein mais juste la possibilité d’apporter quelque chose aux jeunes et de pouvoir montrer que ce poste était indispensable. Le club m’en a donné la possibilité. Débuter au centre de formation est idéal, car c’est un peu un laboratoire où l’on peut tenter des choses et expérimenter des exercices.

 

Tu as profité de cette période pour passer tes diplômes ?

Bruno Martini a en effet mis en place une formation spécifique. Vu que je n’ai pas joué en pro, j’ai dû d’abord passer le diplôme d’entraîneur de football pour pouvoir ensuite accéder au certificat d’entraîneur de gardiens de but.

Cette formation est suffisante pour pouvoir entraîner des gardiens professionnels ?

La difficulté de ce poste est de ne pas s’enfermer dans une routine. Pour garder le gardien éveillé, il faut de temps en temps le surprendre sans trop le bousculer. Cela passe par une remise en question des exercices. On peut trouver des idées dans tes livres ou en regardant ce qui se passe à l’étranger mais il faut aussi parfois créer un exercice à partir d’une action de match. Cette touche personnelle est importante. Il faut aussi accepter qu’un exercice ne prenne pas. Cela m’est arrivé sur des sorties dans les pieds. Cela fonctionnait chez les jeunes mais pas chez les pros.

 

Après le départ de Laurent Denis, tu as été promu chez les pros. C’est très différent ?

Carrément ! Former des jeunes et entraîner des gardiens chevronnés qui ont déjà de l’expérience et de la maturité sont deux missions très différentes aussi bien dans l’approche que dans l’échange puisque l’on se retrouve ici face à des adultes. Les objectifs divergent également puisque nous formons un jeune pour qu’il soit compétitif dans deux ou trois ans alors que le professionnel doit être prêt le week-end suivant. Cela implique un changement dans le discours et sur le plan purement spécifique. Cette différence existe aussi entre Damien Gregorini et Rémi Pillot par exemple. Si je suis amené à ne travailler qu’avec l’un des deux, ce qui arrive par exemple assez souvent les lendemains de match lorsque le titulaire fait un décrassage et qu’un autre joue en réserve, le contenu de la séance sera très différent selon le gardien.

 

Dans une semaine d’entraînement classique, comment se répartissent les exercices spécifiques ?

Chaque séance collective débute par une partie spécifique pour les gardiens. C’est en général beaucoup plus long lors du premier entraînement de la semaine car l’équipe travaille sur le plan athlétique. Le mercredi, Arnaud Lesserteur leur propose une séance spécifique de musculation, plutôt axée sur le haut du corps. Le jeudi est un jour de récupération où l’on travaille le jeu au pied. Ce ne sont pas des exercices très intenses mais plutôt basés sur la gestuelle. Enfin, le vendredi, on débute par de la coordination, de la vivacité au niveau des appuis et on termine par des ballons aériens pour mettre en confiance la veille de match. Mais, ces séances restent un complément de l’entraînement des gardiens. Pour travailler le relationnel, la gestion de la profondeur ou les coups de pied arrêtés, on a besoin des partenaires. Avec l’évolution des règles, le gardien n’est plus dans une bulle et fait partie intégrante de l’équipe dans l’animation défensive et offensive. Il est donc important qu’il soit bien intégré au groupe.

 

Ton travail ne s’arrête toutefois pas sur le terrain…

Le départ de José Martinez (NDLR : ex-responsable vidéo de l’ASNL et nouvel entraîneur adjoint à Evian) m’a en effet obligé à utiliser davantage la vidéo. C’est aujourd’hui un moyen technique indispensable au haut niveau et même chez les jeunes. On ne peut pas se mentir devant des images. Cela permet aussi un échange entre le ressenti du gardien et mon regard extérieur. Je ne suis de toute façon pas fan d’une discussion à chaud et préfère prendre le temps de bien analyser la performance au cours de la semaine suivante. Nous parlons de sa prestation mais aussi de sa relation avec ses partenaires. C’est par exemple lui montrer que l’un de ses défenseurs peut lâcher le marquage et donc l’inciter à être vigilant la semaine suivante.

Est-ce que ton rôle est aussi d’assurer un soutien psychologique ?

Cela fait partie du job et c’est même l’essentiel du boulot chez les pros. Je dois faire en sorte que le gardien soit dans les meilleures dispositions mentales. Il doit avoir le sentiment d’avoir fait le boulot lors de la semaine et d’être prêt pour la compétition. Cela ne veut pas dire forcément qu’il faut être très proche de ses joueurs. Je pense même qu’il faut leur laisser un certain champ d’action et ne pas être trop envahissant. Cela dépend ensuite de la personnalité de chacun. Certains sont plus autonomes ou introvertis. D’autres vont avoir envie de parler et il faut alors être à l’écoute. Ce sont des choses que l’on apprend avec l’expérience.

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