David Carré: "Un devoir d’exigence au quotidien "

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Interviews · 05/10/2011 à 07:41
05/10/2011 • 07:41

Chargé de mettre en place la philosophie de travail du coach, David Carré intervient avec beaucoup de rigueur et de professionnalisme dans presque tous les domaines.

En lançant une recherche rapide sur internet, on trouve très peu d’informations à ton sujet…

Cela fait partie du profil de mon poste. Quand tu es adjoint, tu travailles forcément dans l’ombre, car la communication doit être assurée par l’entraîneur. C’est un domaine très important et ce n’est pas à l’adjoint de donner son avis. Mieux vaut n’avoir qu’une seule voix. Ensuite, je ne suis pas non plus un ancien joueur professionnel et cela explique aussi cette sous-médiatisation. Cela ne me pose aucun problème, car je ne cherche pas la lumière. Mais si des journalistes veulent me poser des questions sur mon mode de fonctionnement ou mon travail personnel, je suis toujours disponible.

 

Apprécier de rester dans l’ombre, cela veut dire ne jamais franchir le pas qui mène vers le poste d’entraîneur ?

Il ne faut jamais dire jamais. Aujourd’hui, je me sens très bien dans ma fonction actuelle et j’ai ainsi pu découvrir le plus haut niveau la saison dernière avec la Ligue des Champions. Après, ce n’est pas parce que l’on a des compétences pour être numéro deux qu’on les a aussi pour être numéro un. L’entraîneur principal est beaucoup plus exposé, car il doit prendre des décisions et réagir vite. Il faut alors beaucoup d’expérience. Avec le président, c’est lui qui a le plus de responsabilités au club. Mon objectif est donc pour l’instant d’être simplement le plus performant possible à mon poste.

Comment es-tu devenu l’entraîneur adjoint de Jean Fernandez ?

C’est mon entraîneur Alain Happe qui m’a donné envie d’être éducateur. À 18 ans, j’entrainais les minimes de Yutz. J’y ai pris beaucoup de plaisir et c’est vite devenu plus important pour moi que ma carrière de footballeur amateur. Après cinq années à Yutz et une autre avec les espoirs d’Algrange, j’ai rejoint le centre de formation du FC Metz comme entraîneur des 17 ans régionaux. Deux ans plus tard, je suis devenu le coach des 17 ans nationaux tout en m’occupant de l’équipe engagée en Euroligue. Je faisais aussi parfois quelques rapports sur des matchs de L2 et j’avais de bons contacts avec Jean. Quand René Lobello, qui était son adjoint, a été obligé de quitter Metz pour des raisons familiales en janvier 2003, le club a dû trouver une solution en interne et j’ai fait l’unanimité.

 

Est-ce que ton rôle a évolué au fil des années ?

Au début, je découvrais une nouvelle fonction et en même temps le haut niveau. J’étais à l’écoute et surtout réceptif à ce que l’on me demandait de faire. Aujourd’hui, c’est ma dixième saison d’adjoint et ma neuvième consécutive en L1. Une confiance s’est installée entre nous. Je connais parfaitement la philosophie de travail de Jean et dois veiller à sa mise en place. C’est le rôle de l’adjoint et pas seulement lors des séances d’entraînement. Cela concerne aussi le fonctionnement du groupe, de ses règles de vie et de son approche de la compétition. Je dois faire en sorte que tous entrent dans le cadre fixé au départ.

 

Est-ce que tu interviens aussi dans le domaine tactique, dans la composition de l’équipe ?

Jean Fernandez est constamment en train de penser à l’équipe et apprécie de solliciter des avis autour de lui. Pour pouvoir répondre de la manière la plus pertinente possible aussi bien sur la tactique que sur les joueurs, je dois emmagasiner le plus d’informations possible lors des séances, mais aussi dans la vie de tous les jours ou lors des mises au vert. Je suis là pour l’aider à prendre ses décisions.

 

L’adjoint doit-il alors forcément partager la même philosophie que l’entraîneur ?

Il doit y avoir une cohésion du staff technique et du staff médical autour de l’entraîneur et des joueurs. Sans être une dictature, car il nous arrive de ne pas être d’accord, on ne doit parler que d’une seule voix. C’est donc mieux d’avoir les mêmes idées au départ. Jean exige beaucoup de professionnalisme, de l’humilité, de la rigueur et de ne jamais renoncer à son devoir d’exigence au quotidien. C’est aussi ce qui me caractérise puisque l’on m’a toujours prêté ces qualités de rigueur et de sérieux.

 

Jean Fernandez est un passionné qui regarde plusieurs centaines de matchs par saison. Cela doit être difficile de le suivre ?

Il est imbattable dans ce domaine (rires). C’est aussi ma passion et je regarde les matchs à la télévision, lis et écoute tout ce qui a attrait au football. Le travail ne s’arrête pas quand on quitte la forêt de Haye. Quoi qu’on fasse, on pense toujours à l’équipe, à la manière de l’améliorer. Même pendant les vacances, on se téléphone continuellement pour échanger des idées sur le recrutement.

 

Cette passion engendre aussi beaucoup de stress. Est-ce parfois difficile à supporter ?

Quand on voit l’importance économique pour un club d’être en Ligue 1, on comprend les responsabilités qui pèsent sur les épaules des entraîneurs. Il ne faut pas pour autant se laisser manger par la pression, mais plutôt relativiser. C’est ce que l’on cherche à faire dans les mauvais moments, chercher le positif pour rebondir. On a vécu des périodes difficiles et on s’en est toujours sorti. C’est clair que les nuits sont plus difficiles, mais il faut trouver l’équilibre pour ne pas ramener tous ses problèmes à la maison. Au contraire quand tout va bien, il faut être encore plus vigilant car ces moments d’euphorie peuvent pousser à la faute.

Tu as raccroché les crampons à 24 ans après avoir évolué à Yutz et Thionville en CFA. Cela ne te démange jamais de participer à certains exercices avec les joueurs ?

Non, je ne participe jamais aux entraînements (sourire). Au début, cela a été dur, mais plus maintenant. C’est important de mettre une distance avec les joueurs. C’était même indispensable quand j’ai débuté à 18 ans avec des gamins de 14 ans puis lorsque je suis entré au centre de formation du FC Metz. Je n’avais que 24 ans quand Francis De Taddeo m’a fait confiance. C’est rare que l’on accorde cette confiance à un jeune entraîneur.

 

Originaire de Thionville, tu as dû être heureux quand Jean Fernandez t’a annoncé avoir choisi l’ASNL ?

Quand on fait de sa passion son métier, qu’on l’exerce au plus haut niveau et en plus près de sa famille, c’est un vrai luxe. Revenir en Lorraine était donc une très bonne nouvelle pour moi. Mais, ce n’est pas ce qui a fait la différence. On en a discuté pendant des heures avec Jean, car on cherchait avant tout à avoir les meilleures conditions de travail possible. Pour moi, l’ASNL était un club stable avec un président très respecté dans le milieu du foot. Voir que les entraîneurs y restaient longtemps en place malgré les tempêtes était aussi un signe de solidité.

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