Gabriel: "Sans plaisir, on avance moins vite"

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Interviews · 13/07/2013 à 08:48
13/07/2013 • 08:48

Depuis sa nomination à la tête de l’équipe professionnelle au début du mois de janvier, beaucoup se sont interrogés sur la méthode Gabriel, transformant une équipe craintive en une formation entreprenante et pleine d’assurance. Ce secret tient en fait en sept lettres : plaisir.

Entraîner au plus haut niveau, est-ce un métier très différent de ce que vous avez pu connaitre avec des équipes de jeunes ?

J’ai encore ce côté formateur où je pose des questions aux joueurs alors qu’eux attendent beaucoup de réponses. Je dois les orienter très vite. C’est aussi différent des jeunes à la formation, car les pros comprennent presque immédiatement où l’on veut en venir. Ensuite, le terrain reste le terrain et il n’y a pas un monde d’écart entre une CFA et une Ligue 1. C’est dans les relations humaines que cela change.

 

Quels rapports entretenez-vous avec vos joueurs ?

Ma plus grande difficulté au départ était que les joueurs m’avaient certainement déjà vu au centre de formation, mais ne connaissaient pas ma personnalité. Dans ces cas-là, quand on se découvre en accéléré, le relationnel est forcément différent qu’après deux ou trois ans de vie commune. Au début, je les ai certainement un peu choqués, mais ils commencent désormais à connaitre mon langage (sourire). J’essaye de leur inculquer mon exigence, de leur donner les moyens d’aller le plus haut possible. Ce sont les joueurs qui font l’entraîneur et pas l’inverse. Ce sont eux les principaux acteurs.

 

Vis-à-vis de vous, on les sent à la fois proches et respectueux…

Le football reste un jeu avec forcément des principes et une hiérarchie. Il y a des moments où il faut rigoler, car cela doit rester un plaisir, et d’autres où il faut travailler. L’amalgame se fait bien. On ne peut pas être sous pression en permanence, ne penser qu’au résultat, au travail. Quand on ne prend pas de plaisir, on avance moins vite.

 

D’où est née cette envie d’offrir du plaisir aux spectateurs ?

Dans le football, il faut être efficace. En même temps, cela reste un jeu avec des gens qui investissent ou qui payent pour voir du spectacle. Avec le cinéma et la musique, c’est peut-être même le plus grand des spectacles. Il est donc important qu’au stade, le spectateur ressente la même joie que les joueurs. Évidemment, c’est difficile quand on perd le match, mais cela ne doit pas l’empêcher de rester supporter et de soutenir son équipe. Pour cela, il faut lui donner quand même envie de participer.

 

Ce n’est pas forcément la philosophie qui domine dans le championnat de France…

Parce que l’exigence est énorme. Chaque entraîneur a peur de se faire virer après trois défaites. Les joueurs ont peur de sortir de l’équipe. Chaque point devient alors un point gagnant pour continuer. Cela conduit à cette espèce de frilosité où il faut d’abord défendre son but avant d’attaquer. Bien sur qu’il faut défendre, sinon on se met en grande difficulté, mais il faut aussi garder le goût d’aller vers l’avant.

Est-ce que certains entraîneurs vous ont inspiré ?

Je suis plutôt comme une éponge qui absorbe. J’ai eu ou rencontré de très bons entraîneurs à Nancy et ailleurs. En quittant le terrain ces dernières années, j’ai aussi pris du recul sur la profession ce qui m’a permis de côtoyer des personnes autrement que dans la compétition. J’aime me nourrir de ces échanges sans avoir de référence particulière.

 

Est-ce que l’échange est aussi à la base de vos relations avec votre adjoint Vincent Hognon ?

Complètement. Il y a toujours plus d’idées dans plusieurs têtes que dans une. Nous sommes en permanence dans l’échange jusqu’au moment où il faut faire un choix. Je suis alors très ouvert et peux le suivre. C’est par exemple arrivé à Rennes alors que l’on menait 1-0. Je voulais changer des joueurs pour évoluer vers autre chose, mais Vincent m’a convaincu du contraire. Il avait raison. Sa présence à mes côtés est une garantie de confiance, de sérénité et de professionnalisme.

 

Comment vivez-vous les matchs ?

À fond. Je joue et vis le match avec les joueurs. Avec Vincent, on essaye d’anticiper tout ce qui peut arriver. Au cours d’une partie, le moindre grain de sable peut enrayer la machine. C’est usant psychologiquement et je quitte toujours la pelouse fatigué.

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